
Los Romanticos
C’est assez hallucinant mais en quelques jours, même s’ils furent très longs, je n’ai pas pris une ride.
Pendant ce temps-là, les mentons de Millesoupirs se prirent pour des Matriochkas, se cachant les uns derrière les autres et rendant la bête au poil d’ours encore plus attachante bien que plus que jamais attachée aux actions secrètes sans lesquelles il ne serait qu’un méprisable amas de cellules dérivant sans résistance vers le côté obscur de la force.
Pendant ce temps-là, Ana Mirena, ma magnifique supérieure erratique se perdit et se retrouva dans tant de bases dissimulées aux 53 coins de la planète que notre Arturo Vidol, ayant renoncé à tout espoir de la revoir, décréta le couvre-chef dès la nuit chutée et l’état de siège, mode des pieds, afin de pouvoir retomber dessus au plus vite si, par miracle, elle nous revenait.
Pendant ce temps-là, nos deux dernières recrues, je n’oserais parler de nouvelles car l’un comme l’autre avait fait leur temps, s’échinèrent à se mettre un peu de plomb dans la cervelle comme je leur avais ordonné. Le gagnant fut Ash Pévée. Ed le Naze, heureusement pour la répudiation de compétence de notre service, n’en rejoignit pas pour autant les sœurs Michemolle. En effet, ses multiples traitements par électrochocs avaient creusé ce qui lui servait d’intermittence grise d’un tel lacis de galeries que le plomb mis dans la cervelle perdait toute vitesse avant l’impact, au point de ressortir au petit bonheur la chance par une oreille ou une narine. En l’absence de Mirena comme de résultats, je fus réduite à me séparer de cet énergumène miné. Par la même occasion, je perdis toute velléité d’apprentissage vis-à-vis d’Ash Pévée me contentant d’user de sa petite taille dans les missions de peu d’envergure.
Pendant ce temps-là, consécutivement au pardon de toutes les fautes de La Fraude et sous le coup d’une passion décuplée, l’arrondissement de 53bis dépassa et de loin celui de Bernard-Henri Vély, plus communément appelé BHV, sorte de grenouille qui gonfle et rumine (en patois) aussi fort que le bœuf.
Pendant ce temps-là, profitant d’un relâchement de ma surveillance corporelle, Axo, ragaillardi par mes soins tout particuliers, s’envola vers d’autres cieux me laissant une dédicace en forme de cœur, habilement cachée à la page des Midgets dans mon missel de cuisine. Il me semble que, depuis, j’ai perdu la foi. Entre autres choses, hélas.
Pendant ce temps-là et alors que partout autour de moi, le monde vieillissait, n’en finissant pas de tourner, que les espions tombaient en disgrâce ou au champ d’honneur, que d’autres les remplaçaient au même rythme que je remplissais mon barillet encore fumant de balles neuves, pendant ce temps-là, pourtant fort long, je ne pris même pas une ride. Mon visage, une fois l’équitation définitive réalisée chaque semaine et les onguents appliqués quotidiennement, restait aussi lisse et pur que mon âme.
Ce soir-là fut enfin celui du travail pour 53bis. Pour la remettre en selle aussi légèrement que possible, je choisis un endroit discret où se mêlaient aux danseurs élégants, d’affreux trafiquants de habanos. Les démasquer ne serait qu’un jeu d’enfant car ils arboraient un tatouage du che (gué va rat) entre le nombril et le haut des cuisses.
C’était sans compter la pussilanimité de la petite qui, alors que nous n’en étions qu’en phase de reconnaissance, se mit en devoir de perdre les eaux et les pédales. Bien vite, quelques danseurs musclés, le cigare aux lèvres et la sueur au front, l’installèrent sur le comptoir. Quelques mojitos, un pour elle et cinq pour moi, m’aidèrent à mener à bien la laborieuse entreprise. Il ne fallut que quatre heures (qu’elle mit à profit pour se plaindre) pour que naisse enfin la relève tant attendue. Transportés d’émotion, les autochtones se lancèrent dans des pas de mambo si compliqués qu’ils me permirent d’apercevoir le faciès tatoué de leur leader spiritueux. Abandonnant la mère sur son lit de menthe, je sortis de mon La Perla deux pinces de kocher pour clamper le cordon de la merveille vagissante et mon fidèle ami à six coups. Tenant en joue la pègre, je déposai le fruit de ses entrailles sur le ventre de 53bis et me hâtai d’attacher les pseudo-révolutionnaires aux piliers de comptoir les plus proches.
Ah, HA !, c’est beau la vie. Si ma mère m’avait laissé le choix, peut-être serais-je devenue gynécologue mais gynécologue de l’extrême car pour vivre sans passion autant se retrouver de l’autre côté de larme !
Bons baisers de partout.
Agent 53
Los Romanticos
Quai au bois à brûler 5/7
1000 Bruxelles
Tel : 02 217 6707